Aujourd’hui, en parcourant mon fil d’actualité Facebook, je suis tombé sur une publication de l’Obs. Et puisqu’une image vaut mieux qu’un long discours, voici la publication en question :
Les députés de la majorité ont voté par erreur contre le prélèvement à la source de l’impôt
Le titre de cette publication est fort, et est fait pour indigner le lecteur. En lisant les commentaires, je m’aperçois que les internautes ont bien cette réaction. Je lis ainsi des messages tels que :
« Ils ne sont pas dignes de nous représenter. Des amateurs qui ne pensent qu’à s’engraisser et flatter leur ego; une HONTE! »
« Des incapables. Vraiment. »
« Quel bande de guignoles dire qu’on le paie en plus ! j’ai honte mais pas EUX ! »
Et j’en passe. Mais soyons honnêtes, leur réaction est compréhensible. Après tout, qui pourrait leur en vouloir de réagir comme cela ?
La presse sur les réseaux sociaux est mensongère
Le seul problème, c’est que les internautes ne lisent que les titres des publications. Et ne perdent que très peu de temps à réellement lire le contenu des articles. Après avoir lu en entier l’article de l’Obs, ma première et seule réaction a été de me dire que finalement, il ne concordait pas avec le texte de la publication sur Facebook. On passe de « les députés ont voté par erreur » à « Certains élus de la majorité étant absents dans l’hémicycle ce jeudi, la droite parlementaire a momentanément réussi à empêcher l’adoption de la réforme ». Ce qui, au final, n’a strictement rien à voir.
Du coup, les commentaires laissés par les internautes ont peu de rapport avec le contenu réel de l’article. Sans avoir lu l’article de l’Obs, juste en voyant le titre, les internautes partent en croisade dans les commentaires contre le gouvernement français et nos élus.
Sur Facebook, les algorithmes sont faits de telle manière qu’à chaque fois qu’un commentaire est posté sur une publication, celle-ci peut potentiellement être affichée chez l’ensemble du réseau d’amis de cette personne. Ainsi, un commentaire haineux peut toucher des dizaines voire des centaines de personnes. C’est d’autant plus problématique lorsqu’il s’agit de fausses informations, surtout quand on sait que Facebook, c’est 1,8 millions de likes par minutes, et 4 100 statuts partagés par secondes.
Et il s’agit là d’un réel problème de fond sur les réseaux sociaux. En publiant des articles au titre mensonger, les médias font l’apologie de la désinformation et sont ainsi capables de manipuler l’opinion publique par le biais des réseaux sociaux. C’est d’ailleurs ce qu’il s’est passé lors de l’élection américaine qui a vu la victoire de Donald Trump : la désinformation a été plus partagée que l’information, d’après BuzzFeed.
Mark Zuckerberg a ainsi été vivement critiqué, et Facebook accusé d’avoir influencé le résultat final de l’élection. Zuckerberg a d’ailleurs promis de lutter contre la désinformation sur son réseau. L’article de l’Obs n’est qu’une publication parmi tant d’autres, mais additionnée aux centaines d’articles du même type, l’opinion publique ne sera plus jamais la même.
C’est pourquoi les internautes devraient tous faire preuve d’esprit critique. Avant de commenter, d’aimer ou de partager n’importe quelle publication, quel que soit le réseau social, il est nécessaire de lire l’article et chercher d’autres sources pour s’intéresser à des points de vue différents, et vérifier la véracité de l’information. Car l’objectif de ce type de publication est de créer le buzz ; et au final, elles y arrivent bien.
La question de la variété de l’information
Certains médias ne sont plus impartiaux. Soit ils souhaitent descendre certaines personnalités, soit au contraire ils souhaitent les faire monter. Il m’est arrivé à certaines périodes de voir des dizaines de publications sur le même sujet, toutes publiées par le même média. Par exemple, la semaine dernière, tous les médias parlaient de la remontée dans les sondages de François Fillon. Sans parler de propagande, agir ainsi manipule l’opinion publique : comment faire preuve d’esprit critique lorsque toutes les publications publiées traitent du même sujet ?
(article de Konbini)
En 2007, Valérie Pécresse avait formulé un autre problème :
Malheureusement les médias fonctionnent à l’audimat et la tendance est à inviter en plateau les personnalités et les candidats qui font le plus d’audimat.
À l’époque, ses déclarations s’adressaient aux médias traditionnels, et tout particulièrement la télévision et la radio. Mais elles restent toujours valables à l’ère d’internet. Les médias en ligne étant rémunérés par la publicité, il ont besoin d’un grand nombre de visiteurs sur leur site web. Et ainsi, écrire sur des sujets polémiques ou à propos des personnalités les plus en vues permet de rapporter plus de clics qu’en faisant de la presse impartiale.
Facebook altère-t-il notre esprit critique ?
Facebook est très puissant. Ses algorithmes sont capables de déterminer quelles thématiques intéressent l’internaute, afin d’afficher sur le fil d’actualité uniquement les choses qu’il souhaite vraiment voir. Les milliers de publications de nos relations sont filtrées par les algorithmes de Facebook, qui affiche uniquement les publications respectant les centres d’interêt de la personne. Facebook nous expose ainsi à des articles qui renforcent nos idées, au lieu de nous confronter à plusieurs points de vue différents. Deux recherches peuvent renvoyer deux résultats différents chez deux personnes aux opinions différentes. Il s’agit du concept de bulle de filtre, théorisé par Eli Pariser. The Times Literary Supplement a écrit :
De ce fait, nous ignorons de plus en plus les points de vue qui nous gênent de personnes que nous connaissons. Nous ne pouvons pas y réagir, ou quand nous le faisons, nos réactions sont de plus en plus polarisées.
Slate a d’ailleurs écrit un article sur ce sujet et traite de ce problème plus en profondeur. La bulle de filtre existe egalement sur les reseaux sociaux les plus populaires, ainsi que sur les moteurs de recherche.